Economie circulaire et bâtiment : concrétisons !

Rédigé par

Cédric BOREL

Directeur

8597 Dernière modification le 06/02/2014 - 18:28

(L’IFPEB propose une journée d’études sur un site industriel le 26 février pour réfléchir sur le thème, voir en bas de page !)

Appartements en béton

Une prise de conscience en cours

Les maîtres d’ouvrages ne peuvent plus ignorer les impacts environnementaux qui sont générés par les matériaux et matériels qu’ils mettent en œuvre, en amont lors de leur fabrication, ou  en aval dans les diverses filières qui traiteront de leurs déchets (1). C’est une question de responsabilité : on ne peut pas juste se reposer sur des prestataires qui évacuent les déchets des usines, des chantiers et des déconstructions...

Or de nombreux industriels ont entrepris une importante éco conception de leurs produits: évaluation des impacts environnementaux sur l’ensemble de leur cycle de vie, pour prioriser leur démarche de responsabilité : process plus efficaces, intégration de matières moins impactantes, impact du produit installé, de sa fin de vie et in fine des réflexions profondes sur sa fonctionnalité.

Lorsqu’ils s’engagent sur cette voie, les industriels remettent en question parfois jusqu’à la réponse du produit au besoin fonctionnel et innovent ! Selon Samuel Mayer, Directeur du pôle Eco Conception "on parle d’éco reconception des produits"(2).

Economie circulaire ou écologie industrielle ?

On peut rêver à une circularité sur un même produit (les produits qu’il génère en fin de vie sont ses propres matières premières) mais cela n’est pas nécessairement l’optimum économique et écologique. L’économie doit être circulaire dans sa globalité, les sous-produits ou les déchets des uns étant idéalement la matière première d’autres, toute filière industrielle confondue.

La juridiction en place - qui a souvent été un obstacle - aujourd’hui facilite et autorise cette intelligence :

  • Un nouveau règlement Européen est venu en 2013 permettre de considérer le déchet comme une matière valorisable. Cette « sortie du statut de déchet » renforcera la qualité des produits proposés par les centres de tri et permet aux industriels intégrant ces produits... de ne plus être nécessairement classés au titre du « tri des déchets ».
  • Sur les déchets de gros œuvre, le projet de loi ALUR, toujours dans un objectif d’économie circulaire, organise un « schéma régional des carrières » qui remplace les schémas départementaux au profit d’une « logistique » et une meilleure articulation entre l’activité de carrière et la gestion des déchets de chantier.

Par ailleurs, la mention du pourcentage de « Re-Use » (intégration des produits recyclés) dans les certifications anglo-saxonnes comme le LEED, a forcé le mouvement et accéléré le besoin en matières premières secondaires. L’« école française » a souhaité se placer sur la transparence : la communication d’impacts environnementaux sur tout le cycle de vie par des fiches de données environnementales et sanitaires (FDES).

Sait-on vendre son avance environnementale ?

Un industriel volontairement en avance est un industriel qui éco conçoit, qui se préoccupe de sa filière aval voire la manage activement. Il a plusieurs alternatives :

  • investir dans de la capacité de traitement de ses anciens produits, qu’il recyclera,
  • co-innover, s’il n’a pas l’expertise nécessaire pour gérer la fin de vie de ses produits, il s’entoure d’ingénieurs, d’autres entreprises qui peuvent l’aider à développer une alternative fin de vie satisfaisante,
  • abonder à minima un organisme collectif de retraitement de ses produits parfois porté par sa filière (éco organisme).

Le problème de la fin de vie reste la traçabilité des produits et leur récupération: mémoire des produits installés, organisation de leur collecte, suivi, « logistique inversée", une solution adaptée à l’état du produit récupéré, l’implication des parties prenantes... Tout cela est compliqué à mettre en place sous contrainte économique (un coût qui soit raisonnable et satisfaisant pour le client).

C’est un classique de l’industrie: un acteur en avance a des coûts structurellement plus élevés, il investit dans de la R&D et éventuellement dans un outil industriel de traitement des déchets.Recyclage de fenêtres PVC

A l’opposé du spectre, le « délinquant environnemental » ne sera rattrapé que par le marché (augmentation structurelle du coût des matières premières, de l’énergie) ou la réglementation.

Même si à ce moment-là on peut parier à coup sûr qu’il sera trop tard pour lui... (Extinction du dinosaure!)

 

Prescription et impacts environnementaux

C’est aux prescripteurs de jouer leur partition pour que le bénéfice environnemental devienne un avantage concurrentiel. Ils portent une grande responsabilité dans l’amélioration de l’offre en élevant leur niveau d’exigence sur le plan environnemental, en favorisant l’accès au marché des industriels qui, preuves à l’appui, pourront attester de performances supérieures.

Aujourd’hui, des Déclarations Environnemental de Produit (EPD) attestent des impacts calculés analyse du cycle de vie (ACV) du produit, selon la norme Européenne EN 15804(3). En France, ce nouveau cadre pour les EPD doit encore être transposé dans leur équivalent national, nos « FDES ».

Toutefois il faut rappeler qu’une « FDES » ou « EPD » n’est pas une preuve de qualité environnementale, mais une information d’impacts, bons ou mauvais, produite en toute transparence. Il faut passer à l’étape supérieure, c’est à dire faciliter leur revue critique.

C’est sur ce point qu’il faut inventer quelque chose.

Les mécanismes de prescriptions sont classiques et bien connus. On préfèrera une écriture efficace aux clausiers fleuves, voir un marquage de qualité basé sur l’analyse du cycle de vie, qui permette simplement à un maître d’ouvrage d’exprimer sa préférence pour un produit plutôt qu’un autre au sein d’une famille donnée.

Cette réflexion est encore à construire.

Cédric BOREL

 

Invitation à une journée d’étude sur le sujet: 26 février 2014

Dans la limite d’une quinzaine de personnes, L’Institut Français pour la Performance du Bâtiment organise la visite d’un site industriel qui préfigure l’économie circulaire. Nous nous poserons les questions du lien entre les donneurs d’ordre et les industriels, la création de valeur et le partage du bénéfice : toute l’information sur ce lien.

Références

[1] Le secteur du bâtiment représente environ 15% de la production de déchets du BTP, soit 50 millions de tonnes par an (à titre de comparaison, chaque année, environ 30 millions de tonnes de déchets ménagers sont produits). 65% proviennent de la démolition, 28% de la réhabilitation et 7% de la construction neuve. Aujourd’hui, la valorisation « matière » (recyclage) des déchets du bâtiment est estimée à moins de 50% (Source : MEDDE).

[2] Lien sur le Pôle Eco Conception : http://www.eco-conception.fr

[3] Contribution des ouvrages de construction au développement durable - Déclarations environnementales sur les produits - Règles régissant les catégories de produits de construction.

Liens

Pour plus dinformation sur la prescription et l'analyse du cycle de vie, communautés Construction21 en lien avec le thème :

-          Communauté Publique de Julien Hans (CSTB): « Fondement des ACV pour la construction » 

-          Communauté de travail privée IFPEB :  « ACV et prescription ».

 

 

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