Comment s’accorder en matière de confort thermique des espaces urbains? La démarche de Nantes Métropole

5102 Dernière modification le 23/12/2019 - 09:38
Comment s’accorder en matière de confort thermique des espaces urbains? La démarche de Nantes Métropole

Une dizaine de journées chaudes [1] supplémentaires depuis les années 1970 en région Pays de la Loire, des niveaux de surmortalité importants lors de la canicule de 2003 dans l’ouest, des augmentations majeures des débits de boisson en période de canicule [2]... les impacts des changements climatiques sont déjà visibles, et exacerbés en milieu urbain. En réponse, les villes reconnaissent aujourd’hui la nécessité de s’adapter pour faire face à ces épisodes de chaleurs estivales. Toutefois, la notion de confort thermique revêt une dimension intrinsèquement subjective. Comment construire alors une démarche d’adaptation aux ilots de chaleur qui tiendrait compte de ces disparités d’appréciation?

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Sensibiliser et Informer sur le phénomène d’Ilot de Chaleur Urbain

Dans le cadre de la mise en œuvre du volet adaptation au changement climatique de son Plan Climat Air Énergie Territorial (adopté en février 2018), Nantes Métropole a souhaité organiser une journée d’études sur les îlots de chaleur urbains (ICU) et le confort thermique le 26 avril 2018 à Nantes. L’événement, à destination des agents de Nantes Métropole, des communes et de la Société d’Economie Mixte d’aménagement, visait à sensibiliser et informer sur le phénomène d’ICU, ses causes, ses conséquences et les solutions pour l’atténuer ou s’y adapter. Dans un objectif de pluridisciplinarité et de construction partenariale, l’événement a été co-construit en interne avec différents services de Nantes Métropole (développement urbain, espace public, animation-développement durable-climat) et en externe avec des partenaires de recherche que sont le CEREMA, l’IFFSTAR et l’IRSTV.

Le miroir d’eau du château des Ducs de Bretagne - Nantes

Permettre l’expression des vécus d’(in)confort thermique

Pour introduire cette journée d’étude sur les ICU, la première immersion dans le sujet s’est faite à travers l’expression des vécus d’(in)confort thermique. A partir d’une vidéo de « ma thèse en 180 secondes » de Virginie Grosdemouge sur le confort thermique[1], les participants ont été invités à raconter un moment vécu où ils ont pu ressentir une très (trop ?) forte chaleur, dans la ville ou ailleurs, et à décrire les espaces où ils se sentaient le mieux et ce qu’ils avaient pu modifier dans leur quotidien pour y faire face.

Inspiré en partie par les échanges dont bénéficie Nantes Métropole dans le cadre du réseau adaptation, financé par la Direction Régionale de l’ADEME Pays de la Loire, et animé par Auxilia, cette animation a permis de laisser les participants échanger sur leurs perceptions et vécus des épisodes de chaleur. Les questionnements suscités ont au moins un triple intérêts : mettre en exergue la perception subjective et présente du confort thermique et des changements climatiques ; introduire la nécessité de produire des données tangibles, de réaliser un diagnostic objectif des changements observés comme de déployer une approche sensible de l’inconfort thermique ; et éventuellement favoriser l’expression des peurs ou du déni et permettre de désamorcer certains sujets (doute, subjectivité du ressenti, etc.), et également de mieux connaître l’état de questionnement des participants (qu’ont-ils ressenti ? quel niveau de doutes voire de scepticisme ?).

Journée d'études "Imaginez la ville de demain sous un climat plus chaud" - Nantes

l’après-midi. L’objectif était d’inviter les participants à imaginer la ville de demain sous un climat plus chaud et d’identifier les leviers et actions à entreprendre dès aujourd’hui pour atteindre ce futur souhaitable. L’exercice portait sur différents espaces de la métropole nantaise et ce à différentes échelles (métropole, quartier, bâti ou cœur d’îlot).

< p>Un des ateliers de travail consistait à imaginer un cœur d’îlot en 2035 et de repenser ensuite un espace central relativement minéralisé et dont l’usage principal est réservé aujourd’hui à la voiture. L’idée d’une « oasis sauvage » a émergé des participants, servant d’espace de contraste à la fois entre le minéral et le végétal mais aussi entre les intérêts privés et publics. Les participants ont identifiés ensuite plusieurs conditions pour y parvenir : pour commencer, « l’évolution des mentalités mais aussi l’existence d’alternatives à la voiture » afin de libérer de l’espace pour constituer un « îlot sauvage » ; ensuite un « besoin d’évolution des pratiques concernant le rapport à la propriété privée » et une « mutualisation de certains espaces  ». Pour y parvenir, plusieurs types d’actions ont été imaginés par les participants : « planter des arbres sur le parking », « mettre en place des mesures restrictives pour le stationnement », « imposer un coefficient de nature en ville sur les nouvelles rénovations », « co-construire l’espace avec les habitants » ou encore « préfigurer ce que pourrait être le lieu via des événements et expérimentations temporaires ». Enfin s’armer de « patience et de pédagogie pour faire évoluer progressivement les pratiques » !

Bilan : une dynamique amorcée et à maintenir au long cours 

Près de 60 personnes ont participé à cette journée, représentant différents métiers autour de la fabrique de la ville. Au-delà d’une réelle prise de conscience des enjeux et un approfondissement des connaissances relatives aux îlots de chaleur urbains, une dynamique s’enclenche à Nantes métropole, comme dans d’autres centres urbains exposés aux ICU, pour anticiper et articuler les enjeux objectifs et subjectifs de l’adaptation aux changements climatique. Une réflexion est actuellement en cours à Nantes métropole pour mettre en place un cycle de formation à l’intention des professionnels de la ville.

Article rédigé par

  • Cécile JOURDAN, Chargée de mission Plan Climat Air Énergie Territorial et adaptation, Nantes Métropole
  • Elsa RICHARD, Chargée de recherche à Auxilia (PhD), Chercheur associé à l’UMR CITERES 7324 Université de Tours (https://www.researchgate.net/profile/Elsa_Richard)

[1] Journée dont la température est > 25°C en moyenne journalière

[2] Sources : CESER Pays de la Loire, (2016), « Impacts des changements climatiques et mesures d’adaptation en Pays de la Loire », février 2016 ; Chambre d’Agriculture Pays de la Loire, (2016), « Observatoire, Observatoire Régional sur l’agriculture et le Changement cLimatiquE ».

[3] https://www.youtube.com/watch?v=cLIu8GgjUMs

 


Ilot de chaleur, un enjeu d’adaptation au changement climatique

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