Suivez la jeunesse

Rédigé par

Pascal Chazal

1131 Dernière modification le 20/02/2020 - 09:50
Suivez la jeunesse

Les mesures phare, les mesures choc qui devaient découler à l’issue de la Cop 24, les décisions courageuses des gouvernants… Les jeunes, bien au-delà de postures politiques partisanes, n’ont rien vu de concret pour palier les enjeux du réchauffement climatique. Et ce malgré les réquisitoires documentés des scientifiques, chiffres parlants à l’appui, sans oublier le travail de fond en classe du corps enseignant auprès d’élèves sensibilisés de plus en plus tôt aux questions environnementales.

C’est une génération qui a grandi au rythme des films d’animation poétiques et écologiques signés du grand Hayao Miyasaki, vu et revu le blockbuster Avatar (2009) de James Cameron. Elle a intégré la nécessité de se reconnecter au vivant. Il y a un besoin vital pour ces jeunes femmes et ces jeunes hommes de se retrouver ensemble autour de mêmes valeurs où il est question de changer de mode de production et de consommation - s’interposer entre la nature et ceux qui la mettent à mal. La musique agit une fois encore comme vecteur de changement politique et culturel.

À ce titre, le festival éco-responsable We Love Green, niché depuis 2011 dans le Bois de Vincennes, prouve que combattre pour la planète n’est ni déprimant ni d’arrière-garde. Il connaît un succès retentissant avec un public à l’esprit joyeux et collectif qui se déplace avec sa gourde ; les canettes ou les bouteilles en plastique étant bannies des lieux. Le Cabaret Vert à Charleville-Mézières (Ardennes) ou le Climax à Bordeaux sont aussi d’authentiques laboratoires d’initiatives éco-responsables, embrassant tour à tour des questions économiques, sociologiques et sociales. Il existe une véritable fabrique festivalière du savoir écologique qui va bien au-delà d’une programmation purement musicale.

Aujourd’hui, il s’agit de placer l’écologie au centre du jeu et de demander des comptes aux décideurs politiques, de faire preuve de courage à leur place s’il le faut. Comme semblent l’attester les lycéens à travers le globe qui interpellent les gouvernements en se mobilisant dans la rue le vendredi, et de fait, séchant sciemment leurs cours sur les pas de Greta Thunberg. En effet, le 20 août 2018, une jeune fille Greta Thunberg, apparaissait devant le parlement suédois à Stockholm, une pancarte à la main, sur laquelle on pouvait lire : « La grève scolaire pour le climat ». Dix mois plus tard, elle faisait des émules auprès des collégiens, lycéens, étudiants de par le monde. Face à l’urgence climatique absolue, et à l’inertie ambiante, elle a opté pour une ligne sans ambiguïté : sécher les cours afin de dénoncer l’inaction des adultes.

Actuellement, il y a une montée en puissance de la jeunesse qui considère le problème du changement climatique, du point de vue moral. Si nous n’agissons pas dès aujourd’hui, c’est quasiment un crime par négligence, explique le journaliste et écrivain Nathaniel Rich, dans son livre Perdre La Terre.

Pour que notre monde ne soit pas un paradis perdu, la nouvelle génération croit en l’idée que la somme des actions de chacun peut peser par exemple face aux multinationales et à la complaisance des États. Qu’un droit universel contraignant de l’environnement pourrait encadrer les conditions de la transition écologique. Les Pays-Bas, le Pakistan, l’Inde rendent déjà des verdicts qui tendent à reconnaître une responsabilité des États dans l’inaction. Ces jeunes rêveurs assumés et pragmatiques, désirent que les acteurs économiques entrent véritablement dans une conversion avec des objectifs clairement identifiés. Ils refusent de voir leur futur se dissoudre devant leurs yeux. Aux élections européennes, EELV est devenu le premier parti chez les 18-34 ans en France ; résultat qui va de pair avec une sensibilité accrue pour les thématiques écologiques au sein de tous les électorats.

Sur le terrain, des associations de lycéens et d’étudiants provenant de différents établissements de la région parisienne ont montré la voie en s’adressant concrètement au gouvernement. Pour ce faire, ils ont organisé en amont des assemblées générales. Le 19 avril, les Camille du groupe « revendications » au sortir de l’AG Interfac, ont pris à partie le gouvernement sur le secteur du bâtiment.

En France, celui-ci représente à lui tout seul près de près de 40% des émissions de CO2. L’industrie cimentière est clairement dans le viseur, beaucoup trop carbonée à leurs yeux puisqu’elle génère plus de 5% des émissions de gaz à effet de serre. L’éco-construction fédère ces jeunes car elle coche toutes les cases d’une conversion écologique réussie. La possibilité de recourir à des matériaux abondants et simples dans le bon sens du terme, facilement accessibles évitant ainsi l’écueil du transport sur de longues distances. Il y a la perspective euphorisante d’un réel retour à l’économie locale avec par exemple de la construction à base de combinaison bois – terre – paille.

En terminer avec les 230 millions de tonnes de déchets par an, liés aux activités du bâtiment. Il est important de constater les performances remarquables au niveau de l’isolation, contrairement au ciment, avec une consommation d’énergie de chauffage considérablement divisée et une absence de recours à la climatisation. Une nouvelle réalité éco-responsable qui plaide aussi en la faveur d’un changement rapide de paradigme.

Ces jeunes bâtisseurs du monde ont listé un ensemble de mesures à mettre en oeuvre par le gouvernement. Déclencher un plan massif d’isolation des bâtiments déjà existants en lançant en parallèle un plan de développement des compétences par des formations sur tout le pays. Établir un plan de financement par entre autres un mécanisme de prêts à taux zéro. Légiférer sur des méthodes d’éco-construction pour tous les bâtiments à venir ; avec des matériaux qui auront pour origine les filières locales. La division par dix du bilan carbone pour l’univers du bâtiment étant l’objectif à atteindre. Décider que les nouveaux bâtiments à équipement public produisent au moins autant d’énergie qu’ils en consomment. Il est salutaire de voir une nouvelle génération qui invite ses aînés à passer aux actes sans plus tarder car l’heure n’est plus aux demi-mesures. Le marché de l’éco-construction est en pleine expansion, ce sont nos enfants désormais qui nous le disent.

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