Tour Elithis à Dijon : 8 kwh/m2 sans surcoût

Rédigé par

Jean-Philippe Pié

Journaliste

1785 Dernière modification le 01/08/2012 - 10:05

Les immeubles à faible voire zéro énergie, on en parle beaucoup, on en voit beaucoup moins. Non seulement les projets ne sont pas toujours convaincants, témoin les façades percées de fenêtres étroites comme des meurtrières de certains immeubles seulement BBC, mais les surcoûts peuvent être importants (+ 20 à 30 %, pour les projets qui acceptent de communiquer sur cet aspect). Pourtant, la performance énergétique n'est pas synonyme de facture lourde. La tour conçue par la société d'ingénierie Elithis à Dijon, dont elle est aussi le siège social, le démontre. Lors de sa livraison en 2009, l'édifice a été salué par la revue scientifique allemande Rehva comme le bâtiment le plus sobre du monde.

Le bouclier solaire protège de la chaleur l'été et laisse passer la lumière l'hiver.

Cette tour de neuf étages, qui abrite 300 salariés, a coûté exactement le même prix qu'un immeuble standard, soit 7 millions d'euros et 1 430€/m2. Mais elle consomme beaucoup moins qu'un bâtiment BBC ! Après avoir passé deux hivers, sa consommation moyenne s'établit à 8 kwh/m2. La clé ? L'adéquation entre la conception et l'usage du bâtiment. Comme l'explique Thierry Bièvre, directeur général d'Elithis, "on a rien inventé, on a juste observé. Par exemple, les dépenses d'énergie dans un immeuble de bureaux ont peu à voir avec celles d'un immeuble d'habitation. Le poste éclairage peut s'y révéler beaucoup plus coûteux que le chauffage." 

Traduction concrète pour la tour Elithis : pas question de supprimer les grands vitrages ! Bien au contraire, ceux-ci colonisent 75 % de la surface, ce qui fait de cette réalisation une sorte d'antithèse des bâtiments BBC tertiaires. S'ajoutent à ce choix structurant quatre options clés : 
- un design cylindrique, qui n'accroche pas le vent froid ou chaud. 
- un "bouclier solaire", une protection en simple tôle emboutie percée, sur une grande partie du bâtiment. Il protège de la chaleur l'été, laisse passer assez de lumière de l'hiver et s'apparente dans son principe aux moucharabiehs mauresques.
- une toiture photovoltaïque de plusieurs centaines de panneaux, qui couvre l'essentiel des besoins électriques. Elle est pensée comme une 5e façade pour "accepter les regards" des éventuels futurs vis à vis. 
- une chaufferie bois. 

Mais ces qualités techniques représenteraient peu si le comportement des occupants de l'immeuble, les collaborateurs, n'était pas coopératif. C'est au quotidien que se joue l'efficacité énergétique. Un simple exemple, parmi d'autres : les personnes chargées du nettoyage travaillent entre midi et 14h00 et non tôt le matin ou tard le soir. Du coup, les salariés les connaissent et font plus attention à la gestion des déchets, les conditions de travail de l'équipe de nettoyage se sont améliorées et le budget éclairage est réduit. 

Ces méthodes expérimentées depuis 2009 ont fait des petits. La société d'ingénierie a ainsi conçu le bâtiment d'Essilor à Créteil, (une réalisation de 18 000 m2, un chantier de 27 mois avec une partie bureaux à énergie positive) pour un coût équivalent à celui d'un programme standard dans une zone d'activités. Idem pour l'immeuble passif de 3 600 m2 de Pôle Emploi à Auxerre, livré en juillet prochain, ou encore le projet Solas à Clermont-Ferrand, sur 15 000 m2 et là aussi, à énergie positive. Dans tous les cas, pas de rupture technologique, pas de matériau miracle, mais un principe directeur : faire émerger les solutions les plus efficientes en associant tous les contributeurs du projet, de l'architecte aux entrepreneurs, en passant par les futurs usagers. Facile à dire, pas si simple à réaliser. 

Jean-Philippe Pié

Source écobat « Tour Elithis à Dijon : 8 kwh/m2 sans surcoût »


Partager :