Matériaux bio-sourcés : le Cematerre prend de la hauteur et se décline en enduit

Rédigé par

Jean-Philippe Pié

Journaliste

5227 Dernière modification le 05/02/2014 - 14:45

Présente pour la première fois parmi les exposants d’Ecobat cette année, l’entreprise Cematerre, située à Gonfreville-l’Orcher (76), fait depuis quelque temps la démonstration que la terre est bel et bien un matériau d’avenir dans la construction.

Son fondateur, Alain Lefevre a mis au point il y a trois ans un procédé certifié par le CSTB qui associe terre, chaux, ciment et fibre de lin et permet d’édifier des bâtiments R+2. Trois réalisations sont récemment sorties… de terre en Normandie. Cette année, l’entreprise fait évoluer son procédé pour lui permettre de construire des bâtiments plus importants, pouvant aller jusqu’à 4 étages.L’idée, toute simple, consiste à incorporer au mélange des granulats de bétons issus de démolition. « Le granulat recyclé diminue le retrait et multiplie par trois la résistance à l’écrasement. Nous faisons d’une pierre deux coup : améliorer notre procédé et intégrer le granulat de démolition dans le secteur de la construction » explique Alain Lefevre. Jusqu’à maintenant en effet, ces graviers issus de chantiers de déconstruction étaient utilisés pour les remblais et les sous-couches routières, mais ne pouvaient être réinjectés dans la construction béton. «  Pour notre part, nous ne sommes pas soumis aux contraintes des normes béton. Nous pouvons donc profiter librement des qualités de ces granulats » se réjouit Alain Lefevre. 


Ce Cematerre formule enrichie est actuellement en test dans un laboratoire de l’Université du Havre. En parallèle, l’entreprise devrait participer à la réalisation de logements sociaux au Havre, en construisant des cloisons intérieures avec ce matériau pas comme les autres. « Le gros avantage réside dans la régulation de l’hygrométrie, dans des logements très bien isolés. Les cloisons en terre poreuse contribuent à pomper l’éventuel excès d’humidité, lorsque la ventilation, pour diverses raisons, n’est pas optimale » précise Alain Lefevre. Qui compte bien passer rapidement, désormais, au stade industriel.D’autant que l’entreprise ne manque pas d’idées et vient de mettre au point un enduit de façade. Baptisé Toprak (terre en langue turque), il concurrence les enduits traditionnels et devrait bientôt rejoindre les rayons des magasins, lorsque les chantiers-tests demandés par le CSTB auront été réussis. Cet enduit contient de la terre, des sables de granulats recyclés, du ciment, de la chaux et des fibres. Le tout se caractérise par une forte capacité d’isolation. Son autre originalité ? Le limon est livré avec son humidité naturelle, ce qui permet de faire l’économie de l’étape du séchoir, coûteuse et gourmande en énergie.Alain Lefèvre croit dur comme terre au succès de ce nouveau produit. Il travaille sur un projet d’usine de conditionnement, tout en discutant avec de grands donneurs d’ordre. Il étudie aussi la possibilité de livrer le Cematerre en grande quantités, sur le mode des centrales à béton, à partir de plate-formes régionales. On n’a pas fini d’entendre parler de Cematerre.

Jean-Philippe Pié pour Ecobat

Légende photo : L’incorporation de graviers de béton de démolition permet de construire plusieurs étages.


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